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DIMANCHE 24 AOUT 2025 21°Dimanche du Temps Ordinaire . Année C Homélie sur Luc 13, 22-30 « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite »

« Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? », demande quelqu’un à Jésus. C’est une question qu’on peut se poser nous aussi, pourquoi pas ? Et on trouvera toujours des gens qui ont leur idée personnelle sur la réponse. Il y a, mettons, un siècle et demi, certains affirmaient que peu de gens seront sauvés, en s’appuyant sur cette réponse de Jésus : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas ». Il y a, mettons, cinquante ans, certains au contraire affirmaient que tout le monde sera sauvé, en s’appuyant sur la bonté de Dieu.

« Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? » : en réalité Jésus ne répond pas à la question, il répond à côté. C’est toujours ce qu’il fait lorsqu’il s’agit d’une fausse question ou d’une question mal posée, et sa réponse réajuste la question, présente la problématique sous son vrai jour. « Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? … Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ». Cela signifie : ne vous tracassez pas de savoir le nombre de ceux qui seront sauvés : ce qui est important c’est que vous, vous soyez de ce nombre. « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ».


Cette réponse pourrait nous suffire … et pourtant elle nous invite à réfléchir un peu sur cette « porte étroite ». Parce que, aussitôt après avoir mentionné la porte étroite, Jésus affirme que tous les peuples sont appelés au salut : « Alors on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu » ; et saint Paul le résume en disant que Dieu « veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité » (1 Timothée 2, 4). Alors, comment la porte peut-elle être étroite si l’appel à la franchir est large ?

Une porte étroite, nous savons ce que c’est : c’est le péage de l’autoroute un soir de retour de vacances, lorsqu’il y a huit ou dix guichets pour des milliers et des milliers de voitures. Mais en plus, au péage du Ciel, les guichets ferment à une certaine heure, à l’heure où les carrosses redeviennent des citrouilles : « Lorsque le maître de maison se sera levé pour fermer la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : ‘Seigneur, ouvre-nous’, il vous répondra : ‘Je ne sais pas d’où vous êtes’ ».

Eh bien, la porte étroite dont parle Jésus, elle n’a rien à voir avec le péage de l’autoroute, où il y a peu de portes pour beaucoup de voitures et où l’effet d’entonnoir limite le nombre de ceux qui peuvent passer. A l’entrée du Ciel, il n’y a jamais d’embouteillages. Et pourquoi ? Il n’y a jamais d’embouteillages parce qu’il y a une porte pour chacun, et il n’y a donc aucune bousculade pour nous empêcher de la franchir. Chacun a sa propre porte, oui … mais c’est une porte qui est étroite. Ce qui nous empêcherait de la franchir, c’est que nous ne la trouvions pas, cette porte, ou que nous y arrivions en retard, après l’heure de la fermeture, ou que nous soyons trop gros pour y passer.


Y a-t-il un risque de ne pas trouver la porte ? Pour m’éviter de me perdre en chemin, Jésus a préparé tout ce qu’il faut pour m’éclairer et bien me diriger : l’Ecriture Sainte, les sacrements, l’Eglise, l’aide de mes frères chrétiens, etc. Quant à ceux qui ne sont pas chrétiens et ne connaissent pas Jésus, ils peuvent s’orienter eux aussi grâce à la voix de leur conscience, que Dieu a placée en eux et qui les fait chercher Dieu dans la droiture de leur cœur, qui les éclaire sur ce qui est juste et bon.

Le risque d’arriver en retard, après l’heure de la fermeture et d’entendre la réponse « Je ne sais pas d’où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice » : ce risque serait celui de m’endormir sur une fausse sécurité, en me disant que Dieu est bon, que je n’ai rien à craindre parce qu’il m’accueillera toujours. C’est un risque que Jésus signale expressément ; et pour me l’éviter, Jésus m’invite à mener une vie chrétienne sérieuse, à progresser sans m’arrêter sur la route qui mène vers la porte d’entrée du Ciel.

Quant au risque d’être trop gros pour pouvoir passer la porte étroite, pour l’éviter j’ai besoin de m’amaigrir, c’est-à-dire de me détacher de tout ce que je trimbale avec moi d’égoïsme, d’orgueil, de ressentiments, de jalousies, d’attachement démesuré aux biens matériels, etc.


« Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite », dit Jésus. Ces mots du texte français de l’Evangile ne sont pas vraiment satisfaisants, car ils ne rendent pas la force du mot qu’emploie saint Luc. Αγωνιζεσθε εισελθειν, en grec, c’est plus fort que « Efforcez-vous d’entrer », c’est « Menez un combat pour entrer, luttez pour entrer ».

Ce que Jésus attend de nous pour que soyons en mesure d’entrer par la porte étroite, c’est en somme que nous ayons un vrai désir de franchir cette porte ; c’est finalement une attitude de notre cœur, une attitude intérieure d’abord mais qui se traduit par notre comportement extérieur. Et s’il nous demande de lutter pour entrer par cette porte, c’est parce que bien souvent notre désir s’émousse, notre volonté tend à se relâcher ou à se décourager, et nous peinons à suivre Jésus, à nous convertir sincèrement et profondément.

C’est pour cela que nous avons tous besoin de lutter, et dès aujourd’hui, pour nous préparer à franchir la porte étroite. Bien sûr, nous allons à la messe le dimanche et nous faisons ce que nous pouvons pour vivre en bons chrétiens, mais est-ce que cela suffit pour dire que nous combattons, est-ce que vraiment nous luttons pour entrer par la porte étroite ? Jésus nous dit que nous ne sommes jamais dispensés de lutter, de combattre, d’entretenir en nous le désir du Ciel pour progresser toujours sur la voie qui mène au salut.


Nous pouvons pousser un peu plus loin notre réflexion sur la porte étroite. En effet, Jésus a déjà parlé de porte dans une autre circonstance : « Amen, amen, je vous le dis : Moi, je suis la porte des brebis … Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis » (Jean 10, 7.11). Et il ajoute : « Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé » (Jean 10, 9).

La porte étroite, finalement, est-ce que ce ne serait donc pas Jésus lui-même ? Pour la franchir et parvenir au Royaume de Dieu, une seule chose suffit : nous attacher à Jésus de toutes nos forces, et c’est Jésus lui-même, Jésus qui donne sa vie pour ses brebis, qui nous la fera franchir.

C’est un grand encouragement de le savoir … mais cela n’empêche que cette porte restera toujours une porte étroite, parce que cette porte qui est Jésus lui-même, est aussi, d’une certaine façon, la croix par laquelle il est passé et sur laquelle il est mort pour triompher de la mort. Et il veut que nous passions nous aussi par elle pour entrer dans la vie éternelle. Cette croix nous fait toujours frémir et nous pouvons être parfois comme ceux qui, au Calvaire, se tenaient à distance, regardant Jésus de loin, alors que c’est debout au pied de la croix, avec Marie et Jean, que nous devrions nous tenir. Pour nous unir à Jésus, il ne suffit pas de le contempler dans sa Résurrection, il faut aussi nous unir à lui sur la Croix, et c’est peut-être cela la lutte qu’il nous demande de mener pour pouvoir franchir la porte étroite.


« Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? » Peu importe pour moi qu’il y en ait peu ou beaucoup, ce qui compte pour moi c’est que je sois du nombre. C’est Jésus lui-même, qui est la porte d’accès au salut, qui est l’entrée dans le Royaume de Dieu, c’est Jésus lui-même qui m’y fera pénétrer, mais je ne pourrai y pénétrer que si je m’y efforce, si je lutte pour m’unir à lui. C’est un paradoxe : nos efforts sont nécessaires pour parvenir au salut, et pourtant ils resteront toujours incapables de nous y faire parvenir. C’est pour que nous mettions notre confiance en Dieu et pas en nous-mêmes. Le salut est pure grâce de Dieu, mais Dieu ne nous sauve pas sans notre engagement personnel à lutter, à nous tourner vers lui et à nous unir à Jésus dans la vérité de notre cœur.

 
 
 

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